Chapitre 3 - Matinée en clair-obscur

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Les premières lueurs de l'aube percent les rideaux de la chambre d’Iris. Elle ouvre les yeux, encore alourdis par les visions troublantes de la veille. Les images de Mikhaïl, de son regard incandescent et de ses paroles chargées de mystère, dansent encore dans son esprit. Elle repousse les couvertures, ses pensées en désordre, et s’assied au bord du lit. La lumière pâle du matin contraste avec l’intensité de la nuit précédente. Le réveil posé sur la table de chevet affiche 7h15. Iris soupire et s'étire, sentant une lassitude peser sur ses épaules. Pourtant, l’université l’attend. Après une douche rapide, elle enfile une tenue simple mais élégante, un pull gris clair et un pantalon noir. Elle rassemble ses affaires dans un sac, glissant entre ses cahiers un carnet où elle a griffonné des notes sur les légendes vampiriques.

Sur le chemin de l’université, l’air frais de la matinée effleure son visage, mais cela ne suffit pas à apaiser le tumulte de ses pensées. Chaque rue, chaque silhouette croisée semble être un écho lointain de Mikhaïl. Elle se surprend à chercher son visage dans la foule, à prêter une attention démesurée à chaque ombre qui s'étire le long des murs.

Arrivée dans l’amphithéâtre, elle prend place au premier rang comme à son habitude. Le cours d’histoire de l’art débute, et les mots du professeur, évoquant le clair-obscur dans les tableaux de Caravage, semblent étrangement résonner avec ce qu’elle a vécu. "Les ténèbres ne sont jamais qu’un écho à la lumière." Ces paroles s’impriment dans son esprit, réveillant une angoisse qu’elle peine à refouler. Elle tente de se concentrer, mais les pensées de la veille l'assaillent sans répit.

À la pause, Iris se réfugie dans la bibliothèque universitaire, espérant trouver un moment de calme. Elle s'installe à une table isolée, feuilletant distraitement un ouvrage. Mais un détail attire son attention : sur une étagère, un livre relié de cuir noir, frappé de lettres dorées, semble briller faiblement sous la lumière tamisée. Un frisson la parcourt. Ce livre…Elle en est certaine : il ressemble à ceux qu’elle a vus dans la pièce secrète de Mikhaïl.

Tendue, elle tend la main pour le saisir, mais une voix basse et profonde brise le silence.

"Toujours aussi curieuse, Iris Whisper ?"

Son cœur s'emballe lorsqu'elle se retourne. Mikhaïl est là, adossé à une étagère, son sourire sombre et énigmatique contrastant avec la lumière du jour. Sa présence dégage une élégance sombre, presque irréelle, et l’air semble s’alourdir autour de lui.

Il s’avance lentement, chaque pas absorbant le silence, chaque mouvement chargé d’une grâce prédatrice. Les ombres semblent le suivre, comme liées à sa volonté. Iris recule instinctivement, serrant le livre contre elle, comme pour se protéger d’une force qu’elle ne comprend pas. Mikhaïl s’arrête à quelques pas, son regard doré capturant le sien, insistant, brûlant. Ses yeux glissent brièvement vers le livre qu’elle tient, avant de revenir sur elle.

"Pourquoi reculer ?" murmure-t-il, sa voix basse et veloutée s’insinuant comme une caresse glacée.

Elle sent un frisson parcourir son échine. Il n’a pas besoin d’en dire plus. Chaque mot, chaque geste semble calculé pour la troubler, pour brouiller la frontière entre attirance et danger. Il tend la main, effleurant l’espace entre eux sans la toucher. Une tension palpable se crée, presque électrique. Son sourire s’élargit, teinté d’une intensité troublante. Puis, sans un mot de plus, il disparaît dans les ombres, laissant derrière lui un vide oppressant.

Iris reste immobile, son souffle saccadé. Le livre, toujours pressé contre elle, semble plus lourd qu’il ne l’est vraiment, et le repose finalement. Elle sait, avec une clarté troublante, qu’elle ne sera plus jamais seule.