Chapitre 11 - Silence brûlant

La fête de Ravenswood est en pleine effervescence, mais Iris n’y prête qu’une attention distraite. Les guirlandes scintillent dans la nuit, les lanternes suspendues dansent sous la brise, et les enfants courent entre les stands décorés. Mais elle ne voit rien de tout cela. Elle est trop occupée à chercher cette sensation, cette présence qu’elle sent, sans pouvoir l'expliquer. Elle avance au milieu de la foule, son cœur battant plus fort à chaque pas, comme une invitation à un destin qu’elle n’ose affronter.

Mikhaïl, de son côté, se tient dans l’ombre, à l’écart. Loin de la chaleur et de la lumière, il observe les visages qui défilent devant lui, mais son attention est ailleurs. Iris. Il la sent, comme une caresse invisible qui le pousse à la suivre. Ses cheveux, ses gestes, cette nervosité qui flotte autour d’elle, tout l’attire irrésistiblement. Mais il résiste, comme une bête blessée, luttant contre l’instinct de se rapprocher, de la toucher.

Leurs chemins se croisent près du stand de vin chaud. Iris se saisit d’un gobelet fumant, cherchant à apaiser la chaleur soudaine qui envahit son corps. Mais la chaleur du vin ne fait rien pour calmer la brûlure dans son ventre, cette sensation étrange et délicieuse qu’elle éprouve chaque fois qu’il est près d’elle. Elle sent une présence derrière elle, intense et presque suffocante. Elle se retourne lentement.

Mikhaïl se tient là, à quelques mètres, sous une arche lumineuse, ses yeux dorés fixés sur elle avec une intensité glacée, telle une promesse de danger et de plaisir interdit. Il est parfait, irréel dans la lumière douce, son visage pâle et taillé dans un marbre froid, mais il y a cette lueur brûlante dans ses prunelles qui la fige. Un frisson court le long de sa colonne vertébrale. Il est froid, d’une froideur glaciale, mais pourtant...il la réchauffe d’une manière qu’elle ne peut expliquer.

Elle ne peut détourner les yeux. Le temps semble s’arrêter autour d’eux, la foule, la musique, les rires, tout devient lointain. Elle serre son gobelet plus fort, cherchant à se maintenir en dehors de ce tourbillon d’émotions. Mais quand il fait un pas en avant, elle sent une chaleur folle, brûlante, l’envahir. Ses pieds restent ancrés au sol, mais son cœur s’emballe, cognant contre sa poitrine. Il se rapproche encore, chaque pas mesuré, comme si chaque mouvement avait pour but de la faire se perdre dans l’ombre de son regard.

"Iris..." Sa voix, douce et grave, glisse comme une caresse, une invitation. Il n’a pas besoin de dire plus. Elle entend l’appel sous ses mots, la promesse de quelque chose de plus, de plus sombre, plus intime.

Elle le regarde, la gorge sèche, les lèvres entrouvertes, mais aucun mot ne sort. Ses pensées se heurtent les unes contre les autres, telles des vagues contre un rocher. Il tend la main, son regard plongé dans le sien. Un frisson de désir traverse tout son corps lorsqu'il effleure une mèche de cheveux tombée sur son visage. Ce contact, aussi léger qu’une brise, l’électrise. Elle sent son cœur s’emballer, son souffle devenir court. Mikhaïl est si froid, mais la chaleur de sa proximité enflamme chaque fibre de son être.

Un silence lourd s’installe. Iris voudrait s’éloigner, mais elle ne peut pas. Elle est prise dans l’étreinte invisible qu’il tisse autour d’elle, comme un piège délicieux.

"Je suis désolé." murmure-t-il d’une voix presque rauque, comme si ce geste le troublait encore. "Je n’aurais pas dû te toucher ainsi lors de notre dernière rencontre."

Il recule d’un pas, lui laissant un peu d'espace, mais Iris n’est pas prête à le laisser partir. Instinctivement, elle tend la main, l’empêchant de s’éloigner davantage.

"Attends."

Sa voix tremble légèrement, mais c’est un tremblement qu’il reconnaît. Le désir et la peur s’entrelacent dans son appel. Mikhaïl s’arrête, la fixant dans les yeux, un éclat d’incertitude dans son regard. Il voudrait s’éloigner, se cacher dans l’ombre comme il en a l’habitude, mais cette fois, quelque chose est différent. À cet instant, il est trop proche pour reculer.

"Pourquoi es-tu ici?" demande-t-elle enfin, sa voix brisée par une force qu’elle peine à contenir. "Pourquoi m’approcher encore ?"

Il hésite, ses yeux brûlant d’un désir qu’il lutte pour réprimer.

"Parce que je ne peux pas m’éloigner de toi." Ses mots sont une confession, un aveu de plus en plus difficile à ignorer. "Même si c’est...dangereux."

Il se rapproche encore, lentement, son corps froid presque collé au sien. Iris sent chaque frisson, chaque tension de ses muscles. L’air entre eux est chargé de cette électricité, de ce désir latent, telle une promesse brisée à peine murmurée.

Elle baisse les yeux, attirée par sa main tendue, et hésite. Puis, sans réfléchir, elle effleure ses doigts, et tout s’arrête. La brise, les rires, les voix autour d’eux. Ce contact, aussi insignifiant soit-il, enflamme son corps. Une vague de chaleur irrésistible la traverse, ses entrailles se resserrent. Elle relève les yeux, plongeant dans le regard doré de Mikhaïl, et pour la première fois, elle n’a plus peur. Elle veut qu’il vienne. Elle veut qu’il la prenne, dans cette nuit froide, dans ce désir brûlant, qu’il la consume tout entière.

Mikhaïl sent la chaleur de ses doigts se propager à lui. Ses yeux se ferment brièvement, comme s’il se battait contre l’impulsion irrésistible de la prendre ici, maintenant. Mais il se maîtrise, même si tout en lui hurle de la réclamer.

Le monde qui les entoure continue, mais pour eux, il n’existe plus. Ils sont seuls dans cet instant suspendu, dans cette danse silencieuse de désir, de froid et de chaleur.