Chapitres
Iris marche d’un pas déterminé à travers les ruelles sombres de Ravenswood, son manteau serré autour d’elle pour se protéger du froid mordant. Les lampadaires diffusent une lumière pâle, vacillante, comme si la ville elle-même retenait son souffle. L’usine désaffectée se dresse devant elle, imposante et lugubre, ses fenêtres brisées laissant entrevoir l’obscurité qui y règne. Une étrange appréhension s’empare d’elle, mais elle la balaie d’un mouvement d’épaules. Elle est venue pour des réponses.
En franchissant l’entrée, le grincement du portail rouillé résonne dans le silence oppressant. À l’intérieur, l’air est chargé d’une odeur métallique et poussiéreuse, chaque pas d’Iris soulevant un léger nuage de particules qui danse dans la lumière de la lune filtrant à travers les ouvertures. Son cœur bat plus vite à chaque pas, mais elle refuse de reculer. Elle avance, jusqu’à apercevoir une silhouette au loin.
Mikhaïl est là, debout au milieu de l’espace vide, son dos tourné vers elle. Son cœur tambourine, mais elle refuse de céder à l’hésitation. Ses pas résonnent sur le béton, brisant le silence. Lorsqu’elle s’arrête à quelques mètres de lui, il parle, sa voix grave tranchant l’air comme une lame :
"Tu n’aurais pas dû venir."
Avant qu’elle ne puisse répondre, il se retourne brusquement. Ses yeux dorés flambent d’une intensité terrifiante, son visage sculptural déformé par une colère brute. En une fraction de seconde, il est sur elle. Sa main s’enroule autour de sa gorge, froide et implacable, et la plaque violemment contre une machine. Le métal glacé mord son dos tandis qu’un hoquet de surprise lui échappe.
"Iris !" rugit-il, sa voix résonnant dans l’usine comme un coup de tonnerre. "Tu ne comprends rien ! Tu joues avec des forces qui te dépassent !"
Elle agrippe son poignet, tentant de desserrer sa prise, mais il est trop fort. Sa poigne est ferme, brutale, pourtant il ne serre pas au point de la blesser. Ses doigts glacés semblent brûler sa peau, et malgré la peur qui la traverse, une chaleur inexplicable s’éveille au creux de son ventre.
"Je ne te crains pas." parvient-elle à murmurer, sa voix presque brisée.
Ses mots le figent un instant. Ses yeux la scrutent, un mélange de rage et de quelque chose de plus profond, plus sombre, qu’elle n’arrive pas à définir. Il respire lourdement, ses traits contractés par une lutte intérieure.
"Tu devrais..." souffle-t-il, mais sa voix tremble, trahissant une faille dans sa colère.
Sa main reste fermement sur sa gorge, mais ses doigts se relâchent légèrement, glissant presque en une caresse involontaire. Son pouce effleure la ligne de sa mâchoire, envoyant un frisson à travers tout son corps. Elle le regarde droit dans les yeux, le défiant.
"Pourquoi ? Pourquoi es-tu dans mon esprit ? Pourquoi joues-tu avec mes pensées, avec mes rêves ?" murmure-t-elle, sa voix à peine audible.
Il gronde, un son guttural qui résonne comme un écho primal :
"Parce que tu m’obsèdes, Iris !"
Sa main ne quitte pas son cou, mais sa prise devient étrange, presque possessive. Il penche la tête, son souffle glacé caressant sa peau, et leurs regards restent ancrés l’un à l’autre, comme s’ils étaient les deux pièces d’un engrenage dangereux, prêts à s’imbriquer.
Un silence tombe, mais il est chargé d’électricité, chaque battement de leur cœur semblant résonner dans cet espace. Iris sent les doigts de Mikhaïl trembler légèrement contre sa peau, son conflit intérieur visible dans chaque muscle de son corps.
"Si je te laisse partir maintenant, je ne pourrai plus te protéger..." murmure-t-il, sa voix rauque et basse, comme s’il se parlait autant à lui-même qu’à elle.
Iris lève une main tremblante et la pose sur son poignet. Il ne la repousse pas, ne bouge même pas. Elle sent ses veines glacées sous sa peau, mais cela ne l’effraie pas. Elle sait ce qu’il est. Et pourtant, elle reste.
"Mikhaïl..." dit-elle doucement, le ton ferme malgré les tremblements dans sa voix. "Arrête de me fuir."
Ses doigts se crispent une dernière fois contre sa gorge avant de relâcher légèrement leur pression. Mais il ne la lâche pas, sa main restant là, comme s’il ne pouvait s’en empêcher.
"Tu ne sais pas ce que tu demandes." murmure-t-il, ses yeux plongeant dans les siens avec une intensité suffocante.
"Alors montre-le-moi."
Ses mots le traversent comme une déflagration. Mikhaïl ferme les yeux, sa mâchoire se contractant sous l’effort de contenir l’orage en lui. Mais lorsqu’il les rouvre, ses prunelles brûlent d’une lueur féroce, sauvage, où se mêlent désir et menace.